Mis à jour : vendredi 7 octobre 2022

Princesse Mononoke : Art et technique

Graphisme : entre traditions et modernité

Est-il besoin de parler de l'incroyable qualité de l'animation et de la stupéfiante beauté des décors ? Plus que jamais, un film du studio Ghibli a fait preuve d'une richesse et d'une inventivité visuelles extraordinaires. Les paysages et les représentations de la forêt, notamment, sont de toute beauté tant au niveau de la composition, de la finesse du dessin, qu'au niveau des couleurs. Hayao Miyazaki et son équipe ont visité de l'île de Yakushima pour s'inspirer de ses forêts denses et de ses montagnes escarpées.

Le travail sur l'eau, élément ô combien difficile à représenter en animation, est remarquable. On peut noter par exemple que l'eau change en fonction de l'angle de prise de vue. Par ailleurs Miyazaki prend le parti de s'éloigner de la représentation habituelle bleue et opaque de l'eau dans les films d'animation. Ainsi l'eau du lac du Shishi-gami est en même temps transparente et sombre, presque noire. De même, l'eau des torrents, chargés de boue, prend une couleur marron plutôt que bleue.

Bien que Princesse Mononoke soit le premier film du studio Ghibli à utiliser de manière importante l'outil informatique, les images numériques se fondent parfaitement avec l'animation traditionnelle. Par ailleurs, la richesse des effets visuels provient encore principalement des techniques traditionnelles : dessins à la main et colorisation sur cellulo. Seuls 100 des 1 600 plans du film ont été réalisés à l'aide de l'ordinateur. Voici une rapide énumération des techniques d'infographie utilisées :

Les images de synthèse

Dans Princesse Mononoke, le but était de créer des images de synthèse s'intégrant parfaitement avec l'animation sur cellulo et préservant le côté traditionnel de l'image. Pour cela l’équipe à recours à différentes techniques.

Images 3D

Hayao Miyazaki tenait à des images 3D qui puissent se fondre avec l’univers bidimensionnel de l’animation sur cellulo et qui ne ressemblent pas à des images générées par ordinateurs.


Exemple d’utilisation de la 3D : Ashitaka tire une flèche tout en chevauchant Yakkuru
alors qu’une masse de tentacules grouillantes (en 3D) s’est enroulée à son bras.

Le mapping

Technique visant à recréer l’illusion de vitesse et de profondeur d’un décor en mouvement en projetant une texture/décor traditionnel sur une simulation 3D de la topographie du terrain du plan. Une caméra virtuelle crée ensuite le mouvement, donnant espace et profondeur au plan.


Exemple de recours au mapping avec les scènes où Ashitaka chevauche Yakkuru.

Le morphing

Cette technique est utilisée pour montrer le changement et le passage du temps avec des images enchaînées ou en modifiant une image.

Exemples de morphing : la décomposition du Tatari-gami ou encore la pousse de la jeune végétation à la fin du film.

Les particules

Cette technique permet de générer des particules lumineuses qui semblent se mouvoir comme des choses vivantes. Elles sont animées selon des lois physiques classiques (gravitation, direction du vent, tourbillon...).


Exemple de particules : les globules qui s'échappent du corps du Didarabocchi ont un comportement très réaliste.

Compositing numérique

Le compositing par ordinateur permet le mélange de plusieurs couches de dessins. Il n'est pas très différent du compositing traditionnel optique mais la qualité est meilleure, le rendu plus convaincant et la marge de manœuvre plus grande.


Mise en couleur numérique

Il s'agit simplement de scanner l'image pour lui appliquer des couleurs. Ce procédé a été d'un grand secours pour alléger le travail de l'équipe et accélérer la production. Princesse Mononoke est le premier film du studio Ghibli pour lequel le travail de colorisation n’a pas entièrement été effectué sur le traditionnel celluloïd et a avoir été mis en partie en couleurs par ordinateur.

La bande sonore et la musique

Une fois de plus la bande-son est merveilleuse. Rarement les silences et les bruits naturels en contrepoint de la musique et des dialogues n'ont servi à ce point le récit et mis en valeur les moments de tensions, comme le silence total dans la scène du dieu-cerf guérissant Ashitaka donnant l'impression que le temps s'est arrêté.

La sublime bande originale de Princesse Mononoke a été une nouvelle fois composée par Joe Hisaishi. Cette sixième B.O. pour un film du studio Ghibli est encore une réussite éclatante. Comme à son habitude, Hisaishi a composé plusieurs thèmes principaux qui sont interprétés de diverses manières selon les scènes. Ce sont des compositions magnifiques qui imprègnent le spectateur et lui reviennent par la suite constamment en mémoire.

La musique contribue beaucoup au souffle épique qui nous transporte tout au long du film. Hisaishi y alterne des thèmes symphoniques somptueux avec des morceaux plus calmes, d'une grande pureté. En particulier, la chanson-titre, interprétée par un jeune homme de 28 ans, Yoshikazu Mera, est bouleversante. Elle surgit de nulle part, au milieu du film, lorsque Ashitaka se réveille au côté de San dans la caverne. La tristesse de cette mélodie cristalline est celle d'une profonde blessure intérieure.